2005/07/05

La découverte de l'Amérique

Après avoir traversé l'Atlantique en ramant dans une gallère, Bardamu arrive à New York.

Pour une surprise, c'en fut une. À travers la brume, c'était tellement étonnant ce qu'on découvrait [...]

Figurez-vous qu'elle était debout leur ville, absolument droite. New York c'est une ville debout. On en avait déjà vu nous des villes bien sûr, et des belles encore, et des ports et des fameux même. Mais chez nous, n'est-ce pas, elles sont couchées les villes, au bord de la mer ou sur les fleuves, elles s'allongent sur le paysage, elles attendent le voyageur, tandis que celle-là l'Américaine, elle ne se pâmait pas, non, elle se tenait bien raide, là, pas baisante du tout, raide à faire peur.

On en a donc rigolé commes des cornichons. Ça fait drôle forcément, une ville bâtie en raideur. Mais on n'en pouvait rigoler nous, du spectacle qu'à partir du cou, à cause du froid qui venait du large pendant ce temps-là à travers une grosse brume grise et rose, et rapide et piquante à l'assaut de nos pantalons et des crevasses de cette muraille, les rues de la villes, où les nuages s'engouffraient aussi à la charge du vent.
- Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit

Aucun commentaire: