2008/03/26

Tout aussi doux qu'une pluie d'été

Il y a de cela quelques années (trois ou quatre, peut-être), un nouveau produit pour la peau est apparu sur le marché. J'ai oublié son nom, j'ai oublié la compagnie qui le produisait, mais je n'ai pas oublié la pub. On y voyait deux jeunes nymphes se cacher derrière les arbres et danser dans l'eau. Une voix hors-champs vantait la douceur de ce produit sur la peau des femmes : "Il est doux, doux comme une fine pluie d'été."

Un ou deux étés ont passé, et l'expression a pris une tournure tout à fait inattendue lorsque Israël, en colère, s'est mis à bombarder le Liban, en appelant cette opération "Pluie d'été".

2008/03/24

Lendemains de Pâques

Une histoire qui m'a donné le fou rire:

Kelowna, en Colombie-Britannique, est aux prises avec une véritable invasion de lapins. Quelque 2000 petites bêtes ont pris d'assaut la ville. C'est un véritable fléau qui fait des ravages, car les lapins mangent et grugent tout ce qu'ils trouvent.

[...]

Le sort des lapins a fait l'objet de discussions à la Ville. La conseillère municipale Carol Gran était en faveur de leur extermination.

Elle a cependant changé d'avis, car elle a été émue par des témoignages d'enfants qui ne comprenaient pas que l'on puisse tuer ces petites bêtes.

[...]

Le temps presse, car une lapine peut avoir jusqu'à 200 petits tout au long de sa vie.
- Radio-Canada.ca

2008/03/21

Choc Facebook

Petit débordement Facebook ce matin, du genre "more than what I asked for": une amie fait un commentaire sur la photo d'une de ses amies à elle, qui n'est pas mon amie, mais je peux quand même voir la photo. Sur Facebook, les amis de nos amis sont nos amis, à moins qu'on aille se mêler de réglages de confidentialité et de vie privée ce que, visiblement, cette femme n'a pas fait.

La fille, donc, a partagé une photo avec ses amis et leurs amis, bref avec, en bout de ligne, des inconnus comme moi. Sur cette photo, on peut voir la radiographie de ses hanches. Imaginez, vous vous levez le matin, vous vous dites: tiens, quoi de neuf sur Facebook? Et vous tombez sur une femme qui expose l'intérieur de son corps. Mais ce n'est pas tout, car ces hanches ne sont pas comme toutes les hanches, on voit très bien que celle de droite est armée de plusieurs vis. C'est facile à voir car le métal contraste franchement avec les os. Sous la photo, une légende explique que la femme marche avec des béquilles et le reste de l'album photo (car le reste est accessible) présente en détails les circonstances de l'accident qui a mené à l'opération et, accessoirement, toute sa famille.

Sachant que la Catalogne est très critique face à Facebook, j'ai décidé de lui montrer la radiographie. Tout de suite elle s'exclame: "Mon dieu, on voit sa vulve!" Et elle avait raison, les plis des lèvres étaient là, fantômatiques, au milieu de l'image.

2008/03/19

Guy et moi, sur les pieuvres et leurs bienfaits

Guy dit :
Je prends quelques instants pour te souligner que la nouvelle diète de mon chien Ralf lui cause bien des maux.

Gousse dit :
Oh! Elle vous en cause aussi, par le fait même.

Guy dit :
Oui. A 3:00 AM je frottais les planchers. Ce matin à 6:00, je faisais de même.

Gousse dit :
Hier soir j'ai bien pensé que je passerais la nuit à faire la même chose, après que j'eus mangé de la vieille pieuvre.

Guy dit :
Vieille pieuvre!

Gousse dit :
Oui. La Catalogne me disait: "pouah! n'en mange pas!" Je lui disais: "C'est peut-être la recette?"

Guy dit :
Une amusante recette.

Gousse dit :
Elle me répondait: "J'en ai déjà mangé en Espagne, et ça ne goûte pas ça! Arrête!" De la pieuvre galicienne, une vieille pieuvre galicienne. Le chef avait cru nous berner avec une branche de persil, mais la Catalogne a les papilles fines. Moi, je n'y voyais que du feu. Je croyais qu'il s'agissait d'une recette ordinaire, d'un poulpe moche au goût. Mais la Catalogne parlait de fraîcheur et d'avarie. Puis, nous sommes allés aux vues et nous les avons passées à péter.

Guy dit :
OH! Mais, ça me rappelle Maelstrom. Tu sais, cette réplique où elle dit: "Ah non, ce poulpe est coriace."

Gousse dit :
Je n'ai pas vu ce film, mais je le regarderai bientôt rien que pour voir cette scène pulpeuse.

2008/03/17

Mon iPod et moi

J'ai sur mon iPod un ramassis assez hétéroclite des chansons les plus diverses. En mode shuffle, je passe souvent en grimaçant d'une chanson à une autre, le contraste étant trop disons... frappant. Mais parfois mon iPod me fait des surprises et choisit pour moi, coup sur coup, Moonage Daydream (David Bowie), Montréal -40C (Malajube) et Neighborhood #4( 7 Kettles) d'Arcade Fire. Je soupire alors de bonheur et pense que c'est mon jour de chance. Je devrais peut-être m'acheter de la loterie.

2008/03/11

Je vais être vulgaire et révéler le fond de ma pensée tel que je l'ai aperçu ce matin dans le métro: Quelque part, une bottom se dit: "Je dois trouver preneur." Voilà.

2008/03/09

Une journée incroyable

À tous les dix pas, en nous rendant au marché Jean Talon, la Catalogne et moi disions: "Incroyable" et nous prenions des photos du champ de bataille que la tempête a laissé. Vraiment, ce blizzard hors du commun m'a réconcilié avec l'hiver.

Je me rends compte que ça fait plusieurs fois aujourd'hui que je regarde dehors et dis: "Incroyable".

Le roi des zombies

The King of the Zombies.
A special agent is sent out to find a missing American Admiral whose plane crashed on an island. Unfortunatly, our hero's plane also crashes onto an island that is teeming with zombies. Will he get away on time, or will he find the same fate as this group of walking dead? 1941 / Playing Time: 67 min. / B&W / Not Rated: Questionnable For Children.
- Description à l'arrière d'un coffret regroupant 13 films de zombies.

Hier soir, seul chez moi avec la tempête qui frappait à ma fenêtre, je me suis dit que le moment était bien choisi pour m'attaquer à ce coffret zombique que j'ai acheté avant les Fêtes. Pris d'un soudain élan didactique, j'ai pensé qu'il serait intéressant d'y aller en ordre chronologique, du plus vieux film au plus récent, pour voir comment ça évolue, un zombie. King of the Zombie, 1941... mes parents n'étaient pas au monde, mon grand-père n'était peut-être même pas pubère encore, et en Europe la zizanie prenait des proportions monstrueuses.

King of the Zombies s'ouvre sur une cabine de pilotage occupée par le pilote et un passager, agent spécial des États-Unis d'Amérique. L'heure est à la tempête et les deux hommes, survolant les Caraïbes, voudraient bien se poser quelque part. Entre leurs épaules se glisse la tête d'un homme noir terrifié et pessimiste, qui parle l'argot des afro-américains. Cet homme, c'est l'esclave. Son personnage est idiot, simple d'esprit, mais honnête et sincère, alors que les deux blancs sont impassibles et remarquablement courageux.

Enfin, voilà que l'avion s'écrase dans la jungle, ou du moins dans une maquette de la jungle. La scène est poignante d'incrédibilité. Cut. On retrouve ensuite nos trois comparses éparpillés dans un cimetière anglican, en pleine jungle, sur une île des Caraïbes. L'esclave croit qu'il est mort, mais son maître l'assure du contraire. Les trois comparses entendent des tamtams, puis font quelques pas avant de se retrouver devant un grand manoir (oui, oui, un manoir dans le cimetière anglican dans la jungle dans l'île des Caraïbes). Dans ce manoir vit un grand docteur autrichien qui se retire parfois dans l'ombre pour cracher des chiffres en allemand dans un émetteur-radio secret. On y trouve aussi plusieurs serviteurs à l'air sinistre et de grandes dames au regard vide. On dirait la famille Adam.

Puis il y a les zombies, de vrais zombies, ceux du vaudou. King of the Zombies n'est pas une histoire de contagion, d'épidémie de mort-vivants qui vous croquent le jarret à votre corps défendant, non. King of the Zombies est l'histoire d'un autrichien qui veut tout contrôler et qui n'hésite pas à faire appel à la magie noire et à l'hypnose pour y arriver.

Enfin, le film se termine sur une scène qui, j'en suis sûr, a été réutilisée dans un film bien connu. En fait, depuis cette scène, plus j'y pense et plus je crois que King of the Zombies a inspiré ce film au grand complet. Je vous décris la scène:

L'agent secret découvre un passage secret dans sa chambre et s'y aventure avec son esclave. Ils descendent dans une sombre galerie, trouvent le corps inanimé de la dame du manoir, abandonnée là par le vilain docteur. Derrière le mur, ils entendent des tamtams et des chants rituels. Une porte secrète leur permet d'entrer voir ce qui se passe. Il y a une grande cérémonie, tous les serviteurs sont là à chanter, il y a un trou rempli de feu, le docteur enfile un masque. Il veut transmuter l'esprit de l'Amiral dans le corps d'une jeune femme pour que celle-ci lui révèle le code secret que l'homme refuse de livrer. Mais les deux intrus sont découverts et la cérémonie tombe à l'eau. Le docteur lance alors son escouade de zombies sur l'agent secret et son esclave, mais heureusement les zombies se rebellent contre leur maître. Ils le font reculer jusque dans le trou de feu, où il brûle. Son emprise cesse à ce moment. Tout le monde est libre. Voilà.

La question à 1000$: dans quel autre film le héros découvre-t-il un passage secret qui le mène à une cérémonie de sorcellerie où le shaman meurt brûlé dans un trou incandescent, libérant ainsi les esclaves qu'il avait enchantés?

Je rêve depuis longtemps d'une neige si abondante qu'elle m'empêche de sortir. Eh bien, mon rêve s'est presque réalisé ce matin. La porte d'un balcon arrière étant exposée au vent qui souffle de partout pour imposer sa neige, elle se retrouve, au lendemain du blizzard, bloquée par une généreuse congère. Je pourrais passer par l'ouverture que j'ai réussi à dégager en forçant un peu, mais peu s'en fallait pour que je sois bloqué.

Bloqué... porte arrière... forcer un peu... j'ai l'impression de parler de constipation.

2008/03/07

Il faut me pardonner mes absences et silences des derniers jours. J'avais, voyez-vous, un tas de lentilles jetées par terre à trier, oui c'est ça, des lentilles, j'étais la Cendrillon de mon bureau. C'est une belle métaphore. Il ne manquait que les insultes, quoique, à bien y penser, la situation était déjà passablement insultante.

Mais bon, toujours est-il que me revoici après une semaine à avoir travaillé jour et nuit.

2008/02/28

Surprise

Ce matin, le choc, alors que je dépose mon pamplemousse matinal et mon journal à la caisse de l'épicerie. Max est sur la une et croule sous les livres et les laptops. "Mais je crois connaitre cet homme!", me suis-je exclamé en m'approchant le nez de l'image, histoire de mieux la scruter. La caissière me répond ceci: "Oh oui, moi aussi, parfois, je crois connaître quelqu'un sur le journal, ces photos sont si trompeuses.
- Non, non, je suis certain de le connaitre! Oui, c'est bien lui."
Elle pitonne les prix sur sa caisse, et ajoute : "Oui, oui, je sais, des fois on a cette impression.
- Je le connais, je suis sûr que c'est lui. Et en plus, il travaille au Devoir. C'est lui, pas de doute.
- Oh."
Et je l'ai laissée se boucheber toute seule. Quand même, je sais reconnaitre mes amis quand je les vois.

2008/02/19

Cette nuit j'ai fait mon premier rêve de Barcelone, depuis mon voyage là-bas cet été. J'étais avec Pb à un terminus d'autobus. Nous avons marché dans les environs, nous nous pâmions pour les draps qui séchaient, pendus aux fenêtres des rues étroites. Puis j'ai remarqué que le quartier n'était peut-être pas recommendable aux touristes. Je suis retourné au terminus, ai cherché en vain une ligne pour le centre-ville, ai pris le premier car pour nulle part. Me suis retrouvé au bord du fleuve, le Saint-Laurent.

C'était un tout petit voyage, une timide visite onirique, mais voilà, j'ai demandé mes vacances au patron. Si tout se passe comme prévu, je retourne en Catalogne en juin.

Ce qu'il faut savoir

Il faut savoir, en effet, que la Station est habitée en permanence par des astronautes qui s'y relaient depuis 2001, et qu'en date du mois d'août 2006, environ 23 000 repas et 20 000 collations, bons pour 18 tonnes de nourriture avaient été mangés là-haut.

2008/02/17

Délire total

On se prive d’un levier important. Les dépenses de santé, on le sait, représentent un peu plus de 10 % du PIB, 39 % des dépenses publiques québécoises. En mettant [la santé] dans une bulle, dans un monde à part, on accepte que 10 % de nos ressources ne contribue pas à la création de richesse.
- Alain Dubuc, "Santé : le tabou", Cyberpresse

2008/02/14

Technodogme (bis)

Ce matin, j'avais un pamplemousse dans les mains. Devant moi, un vieillard validait ses billets de loterie. La Catalogne m'attendait près de la porte du magasin.

Le vieillard expliquait au caissier que le billet qu'il lui tendait était gagnant.

Le caissier : "C'est la machine qui va nous le dire".

La machine: "Pas bon."

Le vieillard a insisté, disant qu'il avait vérifié lui-même les numéros, que la combinaison était décomposable dans l'ordre et dans le désordre, qu'il avait les deux premiers chiffres, bref, qu'il avait gagné vingt piasses.

"Monsieur, c'est la machine qui décide."

Le monsieur a repris son billet, en a sorti un tas d'autres à valider. On m'a permis de payer mon pamplemousse entre deux 6/49 et de m'enfuir, pressé.

Dehors, la Catalogne m'a dit: "C'est comme toi mardi avec le technicien de l'Udm.
- Sapristi, tu as raison!"

Technodogme

Cette semaine, j'ai dû aller voir un technicien de l'Université de Montréal pour lui demander un nouveau mot de passe pour accéder au portail du site web de l'institution. J'avais bien essayé de m'en procurer un à partir du site même, mais après des heures de vains essais et de sacres bien sentis, j'ai dû me résigner à me déplacer.

D'emblée, le technicien, avec sa sympathie de technicien, me lance: "Vous savez, les machines ne se trompent jamais. S'il y a quelque chose de pas correct, ça vient de toi."

He patate, c'est qui qui les programme, les machines, hein? C'est qui? Si j'essaie de changer mon mot de passe, que ce nouveau mot de passe est invalide, mais que l'interface me dit pas de problème, votre mot de passe a été changé avec succès, il est où le problème, ducon? De mon côté ou de la machine qui ment?

"Les machines ne se trompent jamais", pouah. On se croirait dans les années 80.

J'étais furibond en sortant de là.

Il y a des journées plus sales que d'autres.

2008/02/08

Thriller a 25 ans.
Plus j'y pense, plus il s'agit des premiers zombies que j'ai vus de ma vie.

2008/02/05

Mon soir de scotch

Jeudi dernier, j'avais rendez-vous avez la Mort (oui, j'ai un ami qu'on appelle la Mort). Sitôt à table, elle me tend des olives fourrées aux amandes que j'ai vite repoussées. "Mortel ami, dis-je, vous avez bien failli me tuer". Puis nous avons tiré le vin et il a bien fallu le boire.

La bouteille finie, il a bien fallu passer à autre chose et c'est alors que la Mort, toute excitée, m'a montré la bouteille qu'elle s'était offerte, du scotch, qu'elle était prête à ouvrir avec moi. Je n'ai pu résister à son fatal enthousiasme, bien que j'aie ma petite idée sur ce genre de whisky. En effet, chaque fois que j'en ai essayé, je n'ai pu m'empêcher de penser que ce devait être ça, le goût de l'eau de Javel.

Mais la Mort m'assurait que celui-là était différent en portant à mon nez le goulot fraîchement ouvert. "Oh! Ça sent la fumée!" m'exclamé-je. La Mort a versé deux verres, y a ajouté quelques gouttes d'eau, "pour libérer les arômes", a-t-elle dit. Puis nous avons bu. Et c'était merveilleusement doux dans la bouche, ça mordillait taquinement dans la gorge, ça se déposait dans l'estomac sans fracas. Envouté, j'ai dû me retenir de finir mon verre à ce moment. J'ai étiré le plaisir, chaque gorgée m'a procuré de vives émotions. Puis enfin, après la dernière goutte, je suis rentré chez moi, ivre mort.

Et tout le jour suivant, j'ai rêvé de scotch.

2008/02/04

Montréal 1re

Ce matin, Montréal est au premier rang dans le concours qu'organise Monopoly pour sa version mondiale. La ville aux cent clochers est devant Paris, Londres, New York... À croire que les Montréalais votent en masse. À croire aussi que les Montréalais sont les seuls à s'intéresser à ce concours. Cet engouement a quelque chose de pathétique. Il trahit le désespoir des Montréalais à faire de leur ville une ville d'envergure. Oui, je serais amusé que Montréal se taille une place sur la planche du prochain jeu de Monopoly, mais j'aurais honte qu'elle aboutisse sur la Promenade.

Mais bon, allez voter, je vous y encourage. Il en restera toujours quelque chose.

2008/01/31

Pléonasme

Un long article aujourd'hui sur Cyberpresse au sujet de l'automutilation, où l'on utilise le pléonasme "s'automutiler" un milliard de fois (c'est une approximation). Nombre de fois où on dit "se mutiler": 0 (c'est exact).

Honte à la journaliste, honte au correcteur.

2008/01/30

Une pilule au fond des gorges
La catapulte tire
Les enfants jouent aux cartes

2008/01/28

Trois petits morts dans la charrette
Quatre cheveux dans ma casquette
Un chalumeau dans ma main droite

2008/01/23

Un espresso, mais sans le café

La vue sur Québec à partir du restaurant du Concorde est pour le moins époustouflante. L'addition aussi.

Pendant que je regardais le fleuve, le serveur est venu nous offrir du café. N'ayant pas touché à une seule goutte depuis plus d'un mois, j'ai demandé la permission à la Catalogne de déroger à mes voeux d'abstinence caféière. Permission accordée. Le café fut versé dans ma tasse. La Catalogne, elle, refusa l'offre. Mais le Catalan qui n'avait jamais traversé l'Atlantique, celui qui aime tant les voitures et qui sacre de plaisir contre le froid, lui, en voudrait-il ? Puisqu'il était aux toilettes, j'ai dit oui à sa place. "Je doute qu'il le boive", m'a dit la Catalogne. "Moi aussi", ai-je répondu.

Quand le Catalan est revenu des latrines, nous lui avons montré sa tasse fumante. Il y a versé un peu de crème, ajouté quelques sucres, brassé calmement avec la cuillère avant de porter le café à ses lèvres. Puis, il a déposé la tasse sur la table et n'y a plus touché du repas. "Tu ne bois pas ton café, Catalan?
- Non, je n'aime pas le café américain.
- Je m'en doutais."
Ces Européens ne boivent que des espressos.

Après le brunch, nous sommes redescendus dans la rue glaciale. Le Catalan sacrait contre l'hiver. Nous avons marché jusqu'au musée du chocolat, sur la rue Saint-Jean. Un autre Catalan est venu nous y rejoindre. Dans ce musée, on fait un incroyable espresso de chocolat. Comprenez-moi bien: je dis espresso DE chocolat car il n'y a que du chocolat dans cet espresso. Pas de café. 100% chocolat. Et du bon, du très bon chocolat.

Nous nous sommes assis devant un comptoir et les trois Catalans se sont mis à parler dans leur langue d'un projet de développement absolument scandaleux près de Valence. Après deux heures, je ne pouvais plus suivre. Mon attention s'en allait doucement. Il n'y avait plus que moi et mon espresso qui, à chaque gorgée, me procurait une certaine jouissance, pour ne pas dire une jouissance certaine.

Au bout de quatre heures nous sommes partis du petit musée. J'ai demandé au Catalan qui n'avait jamais traversé l'Atlantique, qui aimait tant les voitures, qui sacrait contre le froid et qui n'aimait pas le café américain s'il avait aimé son espresso. "Riquissim", qu'il m'a dit.

Je suis bien d'accord avec lui. À 1,95$ c'est pas mal moins époustouflant que de manger au Concorde, mais je ne crois pas qu'il y ait, dans tout l'univers, quelque chose d'aussi délicieux que cette petite boisson de la rue Saint-Jean.

2008/01/22

Al Quebec, hi fa fred

Ce week-end à Québec, le Catalan qui n'avait jamais traversé l'Atlantique n'en revenait pas du froid qu'il faisait. Il en sacrait de plaisir: "Ostie fa fred!" disait-il dans sa langue. Et tout le monde le comprenait.

Pour ma part, je n'étais évidemment pas surpris de ce rude climat. L'hiver passé, devant la statue de René Lévesque, la Catalogne s'est soudain écriée: "Gousse! Mes mains! Mes mains!" Ses mains gelaient. Nous avons dû courir jusqu'à l'hôtel, sinon c'était l'amputation. Bref, il fait froid, à Québec. C'est à cause du vent qui souffle du Saint-Laurent sur une ville qui, construite sur une pente, s'expose de manière indécente. C'est un froid structurel.

Pourtant ce week-end, dans les boutiques, les vendeuses se sont toutes mises d'accord pour dire que ce froid était exceptionnel. Je ne sais pas ce qui leur a pris de dire ça. J'ignore ce qu'elles avaient dans la tête, ces vendeuses. Ça fait 400 ans qu'il fait frette à Québec. Dimanche, il faisait -15 autour des thermomètres. Et les vendeuses mentaient: On n'a jamais vu ça!

Puissent-elles brûler.

2008/01/21

Sacrifices

Milton Blahyi, a former feared rebel commander in Liberia's brutal civil war, has admitted to taking part in human sacrifices as part of traditional ceremonies intended to ensure victory in battle.

He said the sacrifices "included the killing of an innocent child and plucking out the heart, which was divided into pieces for us to eat."

There had been numerous rumours of human sacrifices during the 1979-93 conflict but this is the first time anyone has admitted publically to the practice.
-BBC

Ce week-end, je me suis retrouvé à Québec avec un Catalan qui venait de traverser l'Atlantique pour la toute première fois. Grand amateur de voiture, cet homme s'extasiait devant les véhicules que nous croisions. "Je n'ai jamais vu celle-là que sur internet", m'avouait-il dans sa langue. Et moi, pendant ce temps, je me pâmais sur les façades des édifices. Depuis mon voyage en Europe, cet été, Québec me fait chavirer.

2008/01/18

Je ne pensais pas que ça existait en janvier, mais force m'est de le constater maintenant: des GIBOULÉES.

2008/01/17

Stubbins Ffirth

Stubbins Ffirth n'a décidément rien à envier des filles de 2girls1cup. Ce médecin du début du XIXe siècle était plus-que-déterminé à prouver sa théorie selon laquelle la fièvre jaune n'était pas contagieuse. Voici comment il s'y est pris:

Ffirth decided to bring himself into direct contact with bodily fluids from those that had become infected. He started to make incisions on his arms and smeared vomit into the cuts, then proceeded to pour it onto his eyeballs. He continued to try and infect himself using infected vomit by frying it and inhaling the fumes, and, when he did not become ill, drank it undiluted. Endeavoring to prove that other bodily fluids yielded the same results, Ffirth progressed on from vomit, and would go on to smear his body with blood, saliva, and urine. He still managed to avoid contracting the disease and saw this as proof for his hypothesis. - Wikipedia

Remarquez que malgré tous ces gestes d'éclats, le médecin avait tort. Il doit sa survie au fait que les fluides qu'il a utilisés venaient de personnes qui n'étaient plus contagieuses depuis longtemps.

2008/01/14

Coing-cidence

Le coing est le fruit du cognassier. Piriforme et volumineux il est cotonneux en surface et, à maturité, est jaune et très odorant. Tout comme les nèfles, les coings crus ne se consomment qu'après blettissement. On utilise généralement les fruits mûrs pour confectionner des gelées, des confitures, des pâtes de fruits ou des gâteaux. Les coings pelés peuvent également être rôtis au four. Enfin, le coing peut-être distillé, et l'on en obtient ainsi une liqueur.
- Wikipédia

C'est lors d'un souper mondain que j'ai appris, la semaine dernière, l'existence du coing. Les convives connaissaient le nom catalan de ce fruit, mais pas celui en français. Un dictionnaire traçant les correspondances entre les deux langues a su nous éclairer, quoique pour ma part, je n'étais pas plus avancé. Qu'à cela ne tienne, je n'ai pas hésité à déclarer que, ne sachant pas ce qu'est un coing, et que le monde des coincidences étant ce qu'il est, je ne manquerais pas, dans les prochains jours, de tomber sur un coing par pur hasard.

He bien croyez-le ou non, j'ai eu raison : hier, sept jours après ma prophétie, un homme arrivant tout droit de Catalogne et ignorant tout de ma vie récente, m'a dit qu'il avait une surprise pour moi. De son sac il a sorti un lingot de gelée. "C'est de la gelée de coing que ma grand-mère a faite", dit-il.

Un jour je finirai à Télé-Voyance.

2008/01/08

Titre aperçu sur le site de Radio-Canada: "Faut-il redouter le redoux?"

Le mot de la semaine: redoux

Rien ne semble plus terrifiant que le retour de cette grosse douceur. Hier, à l'ouverture du téléjournal de 22h, à Radio-Canada, Bernard Derome était debout. Derrière lui dans le décors, un seul mot: Redoux.

C'est sérieux, mesdames et messieurs, car il y a du brouillard et qu'on ne sait jamais ce qui s'y cache, dans le brouillard. D'ailleurs les avions sont restés cloués au sol et ça, on sait que ça excite les journalistes. Dans leur logique, un avion est fait pour voler, donc quand il ne vole pas, c'est de la nouvelle.

Le redoux, donc. Pas un dégel. Un re-doux. De la neige qui fond. Oh, il y a bien les rivières qui menacent de déborder, mais pas une ne l'a encore fait, que je sache.

Moi, je ne sais pas, mais ça fait huit ans que je vis à Montréal, et ça fait huit ans qu'il y a un redoux en janvier. J'ai jamais vu personne capoter pour ça. Que s'est-il passé pour qu'on en parle? Ou plutôt: que ne s'est-il pas passé? C'est le genre de question que se posait la Catalogne, hier, en voyant ce battage médiatique. "Gousse, il ne se passe rien dans votre pays", a-t-elle fini par dire. Devant les faits, je dois avouer que je suis d'accord avec elle.

Enfin, j'y vois autre chose, aussi. C'est que, peu importe le temps qu'il fait, nous avons l'idée qu'il devrait faire plus froid. Nous rêvons d'un monde plus froid. C'est notre utopie à nous, humains du XXIe siècle.

2008/01/07

Sale poulet

Hier, la Catalogne et moi, las et affaiblis par nos beuveries du week-end, avons décidé d'acheter du poulet rôti chez l'épicier du coin plutôt que de cuisiner. Bien mal nous en prit, car nous avons ensuite passé la soirée au lit, à nous tordre de douleur.

2008/01/04

Entendu au Cinéma Banque Scotia

Un gars et une fille attendent le début du film.

Gars: Là, ce qui me tenterait, c'est une plote au Cheez Whiz.
Fille: ...
Gars: Je peux pas imaginer meilleur sexe que ça.

2007/12/30

George Sand, Un hiver à Majorque, éd. La Cartuja, Palma de Mallorca, 1971, 192 p.

De ce moment nous devînmes un objet d'horreur et d'épouvante pour la population. Nous fûmes atteints et convaincus de phtisie pulmonaire, ce qui équivaut à la peste dans les préjugés contagionistes de la médecine espagnole.
- George Sand, Un hiver à Majorque

Mais tout à coup, après des nuits sereines, le déluge commença. [...] Les murs étaient si minces, que la chaux dont nos chambres étaient crépies se gonflait comme une éponge. Jamais, pour mon compte, je n'ai tant souffert du froid, quoiqu'il ne fît pas très froid en réalité: mais pour nous, qui sommes habitués à nous chauffer en hiver, cette maison sans cheminée était sur nos épaules comme un manteau de glace, et je me sentais paralysé.
- George Sand, Un hiver à Majorque

Jusque-là nous avions eu un temps adorable; les citronniers et les myrtes étaient encore en fleurs, et, dans les premiers jours de décembre, je restai en plein air sur une terrasse jusqu'à cinq heures du matin, livré au bien-être d'une température délicieuse. On peut s'en rapporter à moi, car je ne connais personne au monde qui soit plus frileux, et l'enthousiasme de la belle nature n'est pas capable de me rendre insensible au moindre froid.
- George Sand, Un hiver à Majorque

Avoir trois ans

Ce blogue a trois ans. Pour cette raison, je crois qu'il est temps de revisiter mon tout premier billet:
J'ai si honte. Deux verres de bière dans le nez, deux pitoyables verres de bière, et voici qu'il me prend cette idée honteuse. Oui, tant qu'il y aura de la honte, il y aura ce blog. Et pendant que ma coloc se plaint du froid qui envahit l'appartement, pendant que la propriétaire dort au chaud dans sa grande maison de Mont-Royal, eh bien voilà, j'inaugure ceci.

La honte est si intense que lorsque la coloc demande: qu'est-ce que tu tapes depuis tout à l'heure, je réponds: rien. Un email. Voilà. Il faut comprendre que la honte initie tout ça et que sans elle il n'y aurait rien.

Et le froid. Le froid aussi. Car le monde est froid. Il y a entre les choses un grave frisson qui s'éloigne et qui reste. Ça brûle de froid. Ça mord, comme les chiennes perfides au fond des ruelles s'en prennent à la main qui les nourrit.

Puis enfin, il y a les mots. Les mots que je lis et que je lirai. C'est au fond l'engagement que je prends: toujours lire un livre, chaque jour pour en noter quelque chose. N'ayez pas peur. Ça ne fera pas mal.
- La Gousse craintive, 12 décembre 2004
À l'époque, le blogue s'appelait Myriosis - La honte et le froid. C'était les deux concepts de départs, la honte, le froid. Et la littérature en filigrane. Qu'en reste-t-il trois ans plus tard, de ces voeux honteux ? Bien peu de choses à vrai dire. J'avoue m'être dissolu dans les avenues (que dis-je les avenues, les ruelles!) les plus diverses, zombies par-ci, belettes par-là, et surtout une gousse qui craint. Je dois me recentrer. J'ai besoin de résilience.

2007/12/29

En allant vers Chibougamau

Après onze heures de route, l'autobus s'est arrêté au beau milieu de la taïga. Dehors il faisait nuit noire et les phares éclairaient une route glacée. Trop glacée pour ne pas faire attention. Et il pleuvait, en plus. Nous avons fait les 200 kilomètres restants à 30 km/h.

2007/12/22

Ce Noël, j'emmène la Catalogne à Chibougamau. Rien de moins.

2007/12/21

Souquez, souquez

Nous recevons présentement au bureau la visite d'un technicien de Vidéotron. Il a trouvé un câble dans le plafond et il tire, tire, tire dessus avec force et fermeté. On dirait un marin.

2007/12/20

Prendre son parti

Voici ce que Mario Dumont avait à dire sur son parti en conférence de presse, aujourd'hui:
On a conscience de ce qu'on a à faire, on est fiers des progrès accomplis, mais la barre est haute. [...] Tout en ne restant pas une gang de chialeux, il faut demeurer une alternative intéressante.
- Mario Dumont
Donc si je comprends bien, non seulement il avoue que les élus de son parti ne sont pas à la hauteur, mais il les décrit aussi comme une bande de chialeux.

Parlez-moi d'un joueur avec un bon coup de patin:


Je laisse parfois passer quelques minutes de hockey à la télé, avec le vain dessein de faire aimer ce sport à la Catalogne. Je lui dis: "Le vois-tu comme c'est beau?". Mais celle-ci, à chaque mise en échec, détourne le regard en s'exclamant: "Gousse, c'est épouvantable, c'est trop violent." J'essaie alors de nuancer, "C'est dur, mais ce n'est pas violent. Ces mises en échecs sont légales, elles font partie du jeu et les joueurs sont équipés pour y faire face."

Mais un coup de patins comme celui de Chris Simon, ça, oui, c'est violent. Le pire c'est qu'il parait que ça faisait deux fois qu'il s'essayait. La première fois, l'arbitre lui a demandé: "Heille, qu'est-ce tu penses que t'essayes de faire?" La réponse ne s'est pas fait attendre.
Et la Catalogne d'être bien contente d'avoir raison.

2007/12/19

Apprendre le catalan à l'Université de Montréal

L'Université de Montréal offre un cours de catalan élémentaire intensif pendant la session d'hiver 2008 (sigle du cours: CTL1991). L'horaire de ce cours est de 16h à 19h tous les lundis et jeudis, du mois de janvier jusqu'à la fin du mois d'avril.

Il s'agit d'un cours pour débutants, de niveau élémentaire, qui couvre le niveau basique (A1 et A2) du Cadre européen commun de référence pour les langues : apprendre, enseigner, évaluer (CECR). De ce fait, à la fin de ce cours, tous ceux qui le souhaiteront vont pouvoir se présenter à l'examen officiel du gouvernement de la Catalogne pour l'obtention du Certificat de niveau basique en catalan (cet examen aura lieu vers la fin de mai début juin 2008).

La période d'inscription des étudiants libres à l'UdeM est commencé depuis le 18 décembre. Que ce soit pour le loisir (vacances), le travail (les affaires parlent en catalan à Barcelone) ou les études, courez vous inscrire pendant qu'il est encore temps!

2007/12/18

Faits d'hiver

Les lendemains de blizzards sont rapidement ternis par les coulisses de pipi de chien sur le manteau blanc de l'hiver. Il y en avait à tous les trois mètres, ce matin, des deux côtés du trottoir.

À quand un règlement municipal ? Après tout, quand il gèle, l'urine est aussi facile à ramasser qu'une crotte.

2007/12/17

Je rêve d'une tempête de neige si grande que les fenêtres des maisons s'en trouvent obstruées. Je rêve d'un lendemain de tempête où il faut non pas se taper une trail dans la neige, mais se creuser un chemin à la pelle.

2007/12/16

Photorama


Plus de 7000 visiteurs dans mon photorama. Merci :)

Il fait beau dans le métro

Dehors c'est la tempête, mais ça ne fait rien, parce qu'il fait beau dans le métro.

2007/12/12

Souvenirs de trappe

Enfants, père nous emmenait parfois à la "trappe", mon frère et moi. Nous descendions alors jusqu'à Fort-Coulonge, où nous prenions un chemin forestier qui allait rétrécissant au fil des heures. À la fin, le chemin se resserrait autour du camion à un point tel que les branches raillaient la peinture dans un grincement monstrueux. Le sol, cahoteux, imposait une conduite lente. Les dix derniers kilomètres prenaient bien une heure. Puis, nous arrivions dans une petite clairière que père avec défrichée. C'est là qu'il avait construit son camp en bois en rond, juste avant la pente qui descendait vers le lac.

Le camp n'avait qu'une seule pièce pour manger, se laver et dormir. Quand nous arrivions, il fallait brasser les matelas des lits, pour effrayer toute souris qui aurait pu y faire son nid. Même chose pour le vieux four à bois, que nous inspections avant d'y allumer le feu qui allait autant nous chauffer que nous nourrir. Puis nous suivions père dans les inextricables sentiers qu'il avait parsemés de pièges. Nous revenions, le soir, les bras chargés de bêtes que nous déposions par terre. C'est là que le carnage commençait. Et il allait durer toute la nuit.

Car ce qui nous intéressait, c'était la fourrure. L'opération se faisait directement sur la table. Martres, belettes et pékans devenaient méconnaissables sans leur fourrure, masses rouges de muscles et jaunes de gras. Mais le plus effroyable restait le castor, que l'on continuait de reconnaître à ses deux dents jaunes et sa queue plate. Et son odeur. Ce sacré rongeur, on avait beau lui arracher toute la peau du corps, il était encore un castor. Sa peau était ensuite tendue sur une planche, où père la fixait avec des centaines de clous, côté carnage à l'air libre et au regard de tous, côté pelage face à la planche, pour le protéger. Sur cette peau ainsi déployée, on distinguait les orifices des yeux et des pattes.

Et l'opération se répétait autant de fois qu'il y avait de castors. Et dieu sait qu'il y en a, des castors, au Canada.

2007/12/05

Des belettes et des hermines

Un simple petit tour sur le web pour en savoir plus et me voilà confus. Était-ce une belette qui faisait notre joie ou une hermine? Il y a au Québec la belette pygmée, la plus petite, mais elle a la queue courte et son bout n'est pas noir. Il y a l'hermine, un peu plus grosse, qui elle a le bout de la queue noire. Mais il en va de même pour la belette à queue longue, qui est un peu plus grande que l'hermine.

La belette

Parmi toutes les prises que mon père ramenait de la trappe, notre préférée, à mon frère et à moi, était sans contredit la belette, car c'était le plus petit carnassier de la forêt laurentienne. Nous la préférions l'hiver, quand son pelage était tout blanc, sauf le bout de la queue, qui restait noir à l'année.

Il y en avait toujours quelques-unes, parmis les nombreux castors, martres et pékans. "T'as attrappé une belette ?" demandions-nous à notre père pendant qu'il sortait de son camion les corps raides de tous ces animaux. Alors il cherchait un instant, puis nous jetait la petite créature avec laquelle nous jouions un instant. Nous la montrions à nos amis. Tout le monde aimait la belette.

2007/11/30

Bon. Il est 6h15 du matin. Je ne dors plus depuis 4h00.

2007/11/29

Les cheveux blancs du sommeil

Un jour où j’avais particulièrement besoin de changer d’air, je me suis précipité chez la coiffeuse. N’allez pas croire que c’est le genre de folie que je fais souvent. Ça n’est arrivé qu’une fois, et c’était cette fois-là.

J’étais donc chez la coiffeuse et je prenais malin plaisir à regarder les ciseaux couper avec tant d’aisance des pans entiers de ma chevelure (déjà courte, à l’époque). C’était comme passer un linge humide sur une surface très sale et de voir que ça part tout seul et d’en jouir, ou encore de sourire en passant l’aspirateur dans un tas de poussière et de voir encore une fois que c’est facile, efficace, et d’en jouir. Oui, j’étais comme ça devant mes cheveux qui raccourcissaient à vue d’œil. C’était facile, ça se faisait tout seul. Et au pied de la chaise s’amoncelait des retailles qu’il serait si facile de balayer qu’on ne pouvait que sourire en y pensant. J’allais partager toutes ces merveilleuses pensées avec la coiffeuse et lui dire à quel point cela sauvait une journée jusque là ennuyante et pénible, lorsqu’elle s’est exclamée : « Ah? Il y a un cheveu gris! »

Mon premier cheveu gris. Le premier signe de ma longue décrépitude jusqu’à la mort. La preuve, s’il en fallait une, que j’allais mourir. J'étais là pour me changer les idées et c'était le moment que choisissait la fatalité pour venir me hanter. En rentrant chez moi, j'ai cherché longtemps le maudit cheveux à travers le miroir. Puis je suis allé me coucher, pour mettre un terme à cette sale journée.

C’était il y a deux ou trois ans. Depuis, je n’ai jamais revu ce cheveux gris, mais un poil blanc est venu troubler ma barbe. Ce poil m’amuse. Je l’arrache en espérant qu’il ne revienne plus jamais. Et il revient chaque fois, le vlimeux. Je prends la pince, et je l’arrache encore. Au moins, ça se contrôle. Ce n'est pas comme mon sommeil. Ça, depuis un mois, c'est foutu. À quatre heures chaque nuit je me réveille - attention, je ne suis pas tiré de mon sommeil, je me réveille, littéralement. Alors je me dis que j'ai le sommeil d'un petit vieux, que je vieillis, que le reste de mes nuits sera comme ça. Et que je ne vivrai pas vieux, ah ça non! Je ne veux pas dormir comme ça pendant cinquante ans

Bref, on pense souvent que la vieillesse, c'est le corps qui fout le camp, mais c'est faux. C'est le sommeil qui s'en va. La vieillesse, c'est un long épuisement qui vient à force de passer mauvaises nuits. La vieillesse, c'est d'abord le sommeil qui prend des rides. Les premiers vrais cheveux blancs sont des minutes de nuit blanche.

2007/11/23

Alors que la Catalogne est en Espagne, l'hiver l'installe à Montréal.

2007/11/19

La victoire des champignons

Ce weekend, un coup d'oeil jeté à la plante m'a permis de voir qu'aucun nouveau mille-pattes n'est apparu. Mieux: la moisissure a commencé à faire son travail sur les cadavres.

J'ai versé un peu d'eau. Les carcasses ont flotté dans tous les sens, le temps que la vague soit absorbée par la terre noire. Bientôt, je les y enterrerai avec une cuillère. Et toute cette saga sera terminée, une bonne fois pour toute.

2007/11/16

Souvenir de chasse

Bien assis au pied d'un arbre où j'avais bien en vue un sentier sylvestre, j'attendais patiemment le passage éventuel d'un chevreuil pour tirer. Autour de moi gigotaient des mulots et des écureuils qui, tous, semblaient indifférents à ma présence. Cette indifférence aurait pu être réciproque, mais ces petites bêtes faisaient tellement de bruits qu'à chaque fois je croyais en vain à l'arrivée du gros gibier. Bref, j'étais agacé.
Et pour ajouter à cet agacement, un couple de perdrix faisaient un incessant aller-retour entre le pied la cime d'un arbre. Or, pour ceux qui ne le savent pas, rien n'est plus soudain et bruyant que l'envol de ces gélinotes. À chaque fois, je ne pouvais m'empêcher de tourner la tête vers elles, révélant ainsi ma présence à un éventuel chevreuil inquiet qui voudrait sortir de sa cachette. Bref, j'allais encore rentrer bredouille.

Souvenir de chasse (ou L'écureuil-saucisse)

Décidément, le chevreuil ne mordait pas. Mes parents ont décidé de se réunir dans ma cache pour le lunch. Nous croquions nos sandwichs en regardant dans toutes les directions, car on ne sait jamais : ce chevreuil qui avait plus tôt foncé vers moi pendant que les loups hurlaient pourrait décider de revenir. S'il revenait, nous serions prêts. Évidemment, il n'est pas revenu.

Tout en mangeant, j'ai parlé des mulots que j'avais aperçus à l'aube. Cela a rappelé à mon père les souris que la chatte, plus jeune, aimait tant chasser. Elle n'en faisait même pas une bouchée, de ces souris. Elle en croquait des bouts et laissait le reste gigoter tout seul. Souvent, elle déposait ces morceaux devant mes parents, fière de sa chasse et de sa cruauté.

Un jour, elle a attrapé un écureuil. Mes parents l'ont trouvé sur le pas de la porte, sans pattes ni queue, la chatte les ayant probablement mangés. L'écureuil, lui, continuait de gigoter et de crier. C'était devenu un écureuil-saucisse.

Et nous, à la chasse, nous remémorant cette scène, avons été pris d'un fou rire qui a fait s'envoler tout espoir de voir un chevreuil approcher.

2007/11/14

L'aube était très froide cette année. À chaque frisson je me demandais ce que je faisais là et je prenais parfois une photo, pour me consoler de ne voir aucun gibier.

Mais soudain le bruit d'une course derrière moi : depuis la forêt un chevreuil approchait. Je l'ai vu surgir dans le bûché, puis bifurquer à gauche en m'apercevant. Au même moment, un loup, à l'opposé de l'éclaircie où j'étais terré, s'est mis à hurler, un long hurlement à glacer le sang, quelque chose de fantômatique. Puis un autre loup, et un autre, et encore un autre, bref, une meute entière de loups se lançait dans un canon d'hurlements pendant que le cerf me regardait une dernière fois avant de retourner d'où il venait.

Le cerf a disparu. Les loups se sont tus. Et tout est redevenu comme avant.

Il y avait un chevreuil sur le bord de la route. C'était un jeune animal imprudent qui s'exposait au danger pour croquer un bout de branche. J'ai continué mon chemin, à bord de ma Goussemobile.

J'aurais un commentaire à faire

Qu'est-ce qui se passe avec l'interface de Blogger? Je n'arrive plus à laisser des commentaires nulle part, pas même sur mon propre blogue!

Je crains.

Souvenirs de chasse

- Deux chevreuils
- Un aigle
- Une meute de loups
- Des perdrix
- Des mulots
- Un pic bois
- Une comète

Mais aucune souris verte.

2007/11/13

L'holocauste, suite

On m'avait prévenu: j'avais beau brûler tous les mille-pattes qui vivaient au pied de ma nouvelle plante, leurs oeufs, tôt ou tard, finiraient par éclore. Et ils l'ont fait. Je me retrouvais donc avec autant de mille-pattes qu'avant et en prime, un nombre à peu près égal de cadavres, un peu comme si chaque bestiole avait son double d'outre-tombe. Un très vilain spectacle. Mais cette fois, j'étais prêt.

J'ai d'abord pris le briquet-lance-flamme et brûlé toute âme qui vive. Puis, m'ayant procuré une bombe aérosol, j'ai pulvérisé de l'insecticide dans la terre noire. Solution finale. Quelques jours plus tard, un seul survivant, blême et affaibli, rampait tant bien que mal. J'aurais pu sortir mes baguettes, mais j'ai préféré les flammes. Puis j'ai aspergé le lieu d'insecticide. Je n'ai pas poussé l'indécence jusqu'à utiliser le spray pour faire grossir la flamme.

Enfin, dans un autre ordre d'idée (mais pas tant que ça), j'invite tout le monde à visionner La Planète sauvage, un film d'animation réalisé par René Laloux en 1973.

2007/11/07

La dictée de la honte

Ici un lien vers des spécimens choisis d'une dictée faite à des élèves de première secondaire. Bien sûr, on a choisi parmi les cas les plus scandaleux, où les fautes sont abondantes et franchement humiliantes. Mais ce qui me frappe encore plus dans ces dictées, c'est que dans plusieurs cas, il manque carrément des mots, voire des suites de mots ! On dirait que ces élèves ont pris une pause, puis ont repris là où le prof était rendu, sans ce soucier du sens de ce qu'ils écrivaient, comme s'ils ne s'agissait que d'un ensemble diffus de lettres et de syllabes. Ils font quoi, ces élèves ? Ils ont des black outs ? Ils tombent dans la lune ?
J'ai froid, j'ai très très froid.

2007/11/05

Manger le nez dans son assiette

Ce weekend nous recevions des amis à souper. C'est l'un des invités qui préparait le repas, une soupe catalane au nom compliqué. Mais notre invité avait ajouté un ingrédient inattendu, en disant: "Tout est bon dans le cochon!"

Une narine, aperçue en remuant la soupe, ne laissa planer aucun doute quant à cet ingrédient mystère...

Émilie se découvre

Parce qu'on est jeune et joli: Histoire de poitrine, sans poulet

2007/11/02

Ce matin, un bébé mille-pattes est né. Quel choc ç'a dû être, pour lui, de naître dans ce monde: une terre noire parsemé d'immenses répliques carbonisées de lui-même, un monde jonché de carcasses.

Je pense qu'il essayait encore de donner un sens à tout ça quand mes flammes l'ont touché. Chouf! Brûlé vif. Il ne s'est même pas débattu.

2007/11/01

Manger aux States

Il y a des hauts et des bas à se nourrir dans les restaurants du Vermont.

Lors de notre dernière escapade dans cet état, la bande et moi nous sommes installés dans le plus chic restaurant que nous ayons trouvé. Il s'agissait du resto d'un grand hotel, bondé de bourgeois, un resto tout en bois, avec un plafond incroyablement haut. Il fallait réserver, et comme nous arrivions à l'improviste, on nous a fait attendre si longtemps que nous avons pu reprendre la route et même retourner siroter des alcools dans notre chambre, beaucoup plus misérable, sans doute, que celles du chic hotel où nous voulions manger.

Enfin, nous voici à table. Ce qui est amusant, quand on mange du côté anglo-saxon du monde, c'est de commander un vin français. On peut le nommer dans la langue de chez nous, en pointant l'article sur la carte : "I'll take the Beaujolais". La serveuse, confuse, regarde au bout du doigt: "I better write this down 'cause I'll forget." Et moi de répondre: "Be careful, it's mispelled." Et la serveuse repart en s'excusant. Ça se fait tout seul, que voulez-vous. À Paris, ç'aurait été tout le contraire.

Puis la serveuse revient avec nos verres déjà remplis. Pas moyen de voir l'étiquette. On a peut-être tous de L'Auberge ou de l'Entre-Côte. Et là je me dis que la serveuse doit se dire: rira bien qui rira le dernier.

Enfin, les plats arrivent. Quoi ? Cette somptueuse description que j'ai lue dans le menu, c'était du poulet frit ??? Avec des mini-dés d'un fruit non-identifiable dont je suis peut-être allergique ? Saupoudré de graines de grenade, ce fruit que j'exècre ? Soupir. J'ai donc passé l'heure suivante à manger de la viande brune enrobée de panure et à téter des crisses de graines de grenade, que je recrachais dans mon assiette quand elles n'avaient plus de jus.

2007/10/31

RACISME, subst. masc.A. 1. Ensemble de théories et de croyances qui établissent une hiérarchie entre les races, entre les ethnies.
- TLF

Je m'en veux terriblement de n'avoir pas parlé plus tôt d'une chronique où Lysiane Gagnon, pour expliquer une statistique montrant que le taux de chômage chez les immigrants était plus élevé au Québec qu'ailleurs au Canada, pointait du doigt la nécessité qu'avaient les nouveaux immigrants d'apprendre le français. Je m'en veux, car aujourd'hui cette chronique ne semble plus disponible sur le site de Cyberpresse. Tant pis. Puisque je m'en souviens de toutes façons comme si c'était hier, il faudra faire confiance à ma mémoire.

Selon madame Gagnon, le fait français au Québec avait comme conséquence principale d'attirer certains immigrants (ceux venant du Maghreb et d'Amérique latine) et d'en rebuter d'autres (nommément les Chinois et les Indiens). Quant à l'immigration franco-européenne, elle serait, selon la chroniqueure, à peu près inexistante ou du moins non-significative. Partant de ce "constat", madame Gagnon ajoute que les Chinois sont les plus productifs et que les Indiens, en plus de déjà parler anglais, forment une main d'oeuvre très qualifier. Voilà ce que nous laisserions filer à nous entêter à parler français.

Nous nous retrouvons donc, toujours selon Madame Gagnon, avec les autres immigrants: ceux du Maghreb et ceux d'Amérique latine. Or, dit-elle, ceux du Maghreb sont les plus affectés par le chômage. Xénophobie? L'auteure suggère que oui, en ajoutant qu'il y a de la xénophobie partout de toutes façons. Quant aux immigrants venus d'Amérique latine, elle déplore que la pauvreté de leurs pays d'origine ait les effets qu'on connaît sur (et je cite de mémoire, mais c'est assez près de son propos): "l'éducation et l'éthique au travail".

Ma question est la suivante: en classifiant et en hériarchisant ainsi les immigrants en fonction de leur pays d'origine, Lysiane Gagnon n'a-t-elle pas tenu un discours raciste? Et ne se sert-elle pas de cet argument pour suggérer que l'usage du français handicape le Québec?

On a les préoccupations qu'on peut. Ce matin, ayant l'esprit libre de mille-pattes et autres bêtes noires, j'ai pu passer à autre chose. Toute suite j'ai soupiré: "Ah non, pas encore les maudits accommodements raisonnables! Chu pu capable!"

Je vais vous le dire, moi, comment va finir cette vaine histoire-là: on va tous finir blasés, écoeurés d'en entendre parler, au point où on va se mettre à pointer du doigt ceux qui ravivent inlassablement cette question sans solution, ceux qui crient au "problème" sans proposer rien de plus. Et tout redeviendra comme avant: dénoncer la xénophobie et tendre vers l'ouverture.

L'holocauste

Hier matin, la tête encore embrouillée par une nuit agitée et cauchemardesque, j'ai aperçu un mille-pattes oser s'aventurer sur le bord du pot de fleur où il a fait son nid. Au pied de la plante, une dizaine de ses congénaires dormaient encore, seuls quelques promeneurs solitaires profitaient de la quiétude matinale pour dégourdir leurs pattes. Cette bestiole audacieuse et aventurière était pour moi la goutte qui faisait déborder le vase - ou devrais-je dire le pot ? Soucieux d'éviter à tout prix une épidémie de mille-pattes dans mon modeste réduit, trop pressé pour sortir mes baguettes chinoises et écrapoutir un à un ces indésirables, j'ai décidé d'employer une méthode plus expéditive, aussi ai-je sorti d'un tirroir le briquet à barbecue, que j'ai ensuite employé, tel un lance-flamme, pour griller les pauvres petits vers. Satisfait de mon ménage, je suis allé travailler.

À mon retour à la maison, j'ai jeté un oeil à l'état de la colonie de mille-pattes : les cadavres carbonisés jonchaient la terre noire et désolée. Cependant, quelques survivants sévissaient toujours, dont un autre téméraire qui, sans doute écoeuré par tant de désolation, cherchait sur le bord du pot de fleur la route vers un monde meilleur. Opération Barbecue. J'ai brûlé ces miraculés.

Et ce matin, au pied de la plante, il n'y avait plus âme qui vive. J'espère que c'est pour de bon.


2007/10/23

Rendre les armes (ou je ne suis pas si zen que ça)

Il y a beaucoup trop de bibittes dans la plante. C'est à la limite du contrôlable. Je m'en vais t'insectisider tout ça.

Au Vermont

Le Vermont n'est pas si vert en automne.Comment un état au nom français, à la capitale au nom français et bordé d'un lac portant le nom d'un explorateur français peut être considéré comme faisant partie du berceau de la civilisation anglo-saxonne en Amérique ? C'est la question que je me posais à mon retour de ma dernière escapade au Vermont, où un nombre suspect de livres sur la Nouvelle-Angletterre dans une librairie de Montpellier me fit douter de mes convictions. Pb, qui m'accompagnait et qui affirmait avoir lu toute l'histoire de cet état, était incapable de me fournir quelque explication.

C'est Samuel de Champlain, le 30 juillet 1609, qui baptisa le lieu "les verts monts". Inutile de dire qu'il baptisa aussi le lac Champlain par la même occasion, mais ce n'est que 57 ans plus tard, en 1666, que la France commença à s'y établir. Les Anglais, eux, se sont installés en 1724 dans le coin sud-est de la région et ont pris le contrôle de l'état en 1763 grâce au Traité de Paris. Voilà pour la toponymie française.

Le capitol, à Montpellier, Vermont.Le Vermont a donc été partagé pendant 39 ans entre les Français et les Anglais. Après le traité de Paris, la région a été disputée par les colonies de New York et du New Hampshire, colonies membre du Dominion of New England. Cette dispute a mené à la République du Vermont, en 1777. Le Vermont est devenu un État en 1791. Voilà pour la Nouvelle-Angleterre.


2007/10/22

Ce matin dans Le Devoir: un article sur le conte.

S'il n'est pas strictement religieux, dit Gougaud, le conte touche au sacré.

Je mets Gougaud au défi de faire un mémoire de maîtrise là-dessus.

Je suis zen

Hier au souper, notre invitée me dit: "Gousse, tu es un bon candidat à la méditation."

Et la Catalogne de renchérir: "Gousse est zen."

Et moi d'ajouter: "Oui, en effet, je suis zen. Encore ce matin, je chassais des mille-pattes avec des baguettes chinoises."

Silence autour de la table, rompu finalement par la Catalogne: "Je crois que notre invitée n'apprécie pas cette histoire de mille-pattes."

"Oh, corrigé-je. J'ai un côté contemplatif, aussi. Je peux passer des heures sans rien faire." Et tout est rentré dans l'ordre.

Aperçu ce week-end:
Stéphanie Lapointe et Louise Deschâtelets.
(Un salut tout spécial à Jean-Pierre, qui apprécie particulièrement ce genre de blogueries.)

2007/10/18

Jean-Pierre

Je suis au téléphone avec Jean-Pierre. J'aime Jean-Pierre, il me téléphone pour me dire: "quoi, t'as pas encore parlé de moi sur ton blogue?"
Je crois que maintenant il devra se trouver un autre prétexte pour m'appeler.

2007/10/14

Mille mille-pattes et deux baguettes

Ce matin, une plante, qui nous a été récemment offerte, était infestée de mille-pattes. Ces bestioles profitaient d'un rayon de soleil pour sortir de terre et me faire pester contre elles. La Catalogne a suggéré de les attaquer avec des ciseaux, mais je trouvais cette méthode trop cruelle, bien que rudement efficace. J'ai donc essayé de les attrapper avec un chiffon, mais ça n'allait pas du tout. Je rammassais de la bouette, mais pas de bibittes. Il ne restait plus qu'une solution: des baguettes chinoises.

Et c'est ainsi que j'ai passé mon dimanche matin penché sur le pot de la plante, baguettes en mains, à pincer minutieusement mille-et-uns mille-pattes, un travail de moine grandement facilité par la coopération de ces petites créatures qui se roulaient en boule au moindre contact. On aurait vraiment dit qu'elles m'aidaient.

Puis j'ai pensé à Karate Kid, film où l'on attrapait des mouches au vol avec des baguettes - les yeux fermés, en plus - et j'ai compris que j'étais sur la bonne voie.

2007/10/05

La tour de la Mignonne

Enfants, nos parents nous punissaient en nous envoyant dans notre chambre. Certains parents sont toutefois plus sévères que d'autres. Le duc de Cardona, qui n'aimait pas que sa fille, Adelà, s'amourache d'un arabe, l'a faite enfermer dans la tour du château, où elle n'était nourrie que de pain et d'eau fraîche. La punition fut si sévère et si longue que la pauvre Adelà finit par en mourir.

Le Catalan et moi, qui passions par-là, ne pument résister à l'envie de l'appeler par la grille de son cachot : "Minyona! Minyona!", criâmes-nous d'une voix nasillarde et moqueuse. L'appel, entouré de nos ricanements puérils et cruels, rebondit sur les parois sombres et froides de l'endroit. C'est tout ce qu'il reste aujourd'hui, dans cette cellule, de la pauvre princesse et son sinistre destin : l'écho de son nom lancé par deux iconoclastes du 21e siècle.

2007/10/01

Hier chez Ikea, j'ai aperçu Jacques Chevalier Longueuil. Puis, quelques heures plus tard, au Mogador, sur la rue Beaubien, j'ai aperçu nul autre que l'artiste auparavant connu sous le nom de Jean Leloup.

2007/09/27

L'automne

Hier. 23h00. Dans mon lit.

Par la fenêtre ouverte j'entends les outardes. Elles profitent de la pleine lune pour voyager la nuit. Je les entends s'éloigner. Puis d'autres passent. Et d'autres encore. Puis encore d'autres. Pendant une heure les volées d'outardes se succèdent. C'est l'été qui déménage.

2007/09/26

Guy et moi, sur la vie de bohème

Guy dit :
Il me manque encore un programmeur

La gousse craintive dit :
Tu sais que je suis le meilleur programmeur de ma rue. Mais je n'irai pas chez vous.

Guy dit :
Bien sûr je sais ça.

La gousse craintive dit :
Tu devrais venir ici, plutôt.

Guy dit :
Nous pourrions sortir et parler dans le dos des gens. C'est tout ce qu'il y a à faire ici.

La gousse craintive dit :
Ce serait de perfides promenades, les plus détestables promenades du monde, et nous y prendrions goût. Nous trouverions du plaisir à marcher en ricanant comme des hyènes. On nous appelerait les hyènes de la rue X.

Guy dit :
Nous nous répandrions en méchancetés.

La gousse craintive dit :
Oh oui. Nous cracherions notre fiel dans tous les sens, en riant. Nous jouerions à qui crache le plus loin.

Guy dit :
Je cracherais très loin. Je sais bien cracher, quand je m'y mets.

La gousse craintive dit :
Les gens nous surprendraient à pisser sur une photo de Benoît XVI dans une ruelle. Ils nous prendraient pour de vulgaires athées. Nous seul saurions de quoi (et de qui) il en retourne vraiment. Et l'écho de nos rires dans les ruelles du Vieux Montréal. L'odeur des égoûts qui monte. Le fiel sur la brique comme une chaude et humide nuit d'été. La pisse dans les canivaux. Ah! Quelle époque ce serait!

La gousse craintive dit :
Parfois, ivres morts à midi, nous gueulerions Le port d'Amsterdam. Et nous nous y croirrions. Ce serait comme en Europe, comme la bohème, mais en beaucoup moins chic. Une bohème post-industrielle, post-moderne, notre bohème à nous. Quelque chose qui n'a plus rien à voir avec l'absinthe. Nous serions ivre de haine et de mépris.

2007/09/25

Simon et Myriosis, sur la crise de la trentaine

Myriosis dit :
Simon, je crois que la crise de la trentaine est commencée, pour moi.

simon dit :
Oh seigneur!!! Pauvre gousse ! Raconte-moi ta crise de 30taine.

Myriosis dit :
Cette crise, oh. Cette crise, ce n'est pas grand chose, une impression que je n'arrive pas encore à décrire comme il faut. J'ai l'impression du temps qu'il me reste, l'impression du temps qui passe,
l'impression qu'il faut en profiter.

simon dit :
Oui. Je comprends.

Myriosis dit :
Je crois que je ne profiterai plus des choses comme avant. C'est ça la différence. Je ne peux plus profiter comme avant. Je dois déguster. Avoir trente ans, c'est apprendre à déguster.

simon dit :
cé si beau.

Myriosis dit :
C'est une forme plus subtile de jouissance. Je pense que c'est là que je suis rendu.

simon dit :
Tu t'y rends bien.

Myriosis dit :
Je trouve cela un peu triste. Non pas pour ce qui s'en vient, mais pour ce qui n'est plus, pour cette façon que j'avais de profiter de la vie et qui ne reviendra pas.

R... et Myriosis, sur la nouvelle orthographe

Myriosis dit :
J'ai une amie qui m'écrit des messages dans un anglais approximatif. Je ne savais pas, R..., qu'on pouvait faire autant de fautes en anglais. Je ne comprends pas comment on peut en arriver là.

R... dit :
Tu devrais lire les travaux de certains des étudiants que je corrige...

Myriosis dit :
En français, je veux bien, mais en anglais ? Peut-être écrit-elle dans ce nouvel orthographe que l'usage d'internet a imposé. Je ne sais pas.

Myriosis dit :
Je crois qu'orthographe est féminin. Je ne sais plus.

R... dit :
L'anglais est plus facile que le français, mais la mode d'écrire sur internet et sur les cellulaires a beaucoup changé l'écriture des gens.

Myriosis dit :
Oui. On dirait que les gens écrivent à la va comme je te pousse. Le lecteur doit alors décrypter. Je trouve que cette façon d'écrire est franchement égoïste. Elle affiche un mépris pour l'interlocuteur.

R... dit :
Oui, tout à fait. Et puis, il y a le probème des profs qui ont toujours laissé passer les étudiants, même s'ils avaient de la difficulté.

R... dit :
Et ça me fait un peu chier les gens qui écrivent "h0w r u 2day".

Myriosis dit :
POUAH! "how" avec un zéro! On dirait un code postal!

R... dit :
Ne ris pas. Il y a des gens qui écrivent ça. Je l'ai vu de mes propres yeux!

Myriosis dit :
Les codes postaux, c'est anachronique. Ces gens, au fond, sont obsolètes.

R... dit :
C'est peut-être ça le problème.

Myriosis dit :
Comment peut-on croire qu'on est cool en donnant à ses mots des allures de code postal ? C'est ridicule.

R... dit :
ça s'appelle être 31337 - traduction de "eleet", de "elite".

Myriosis dit :
Hein??? On dirait un zip code!

R... dit :
C'est les amerloques qui ont parti cette mode. "Elite" (en anglais) se prononce "eleet". Et en chiffres qui ressemblent à ces lettres 31337. C'est complètement fou.

Myriosis dit :
N'importe quoi pour se donner l'impression de faire partie d'une gang.

R... dit :
Zip code, code postal... coïncidence? i think n0t!!!

Myriosis dit :
MDR!

Myriosis dit :
L0L M2R!

R... dit :
Hahahaha! Alors tu vois, l'orthographe de ton amie n'est peut-être pas si pire.

Myriosis dit :
Oh oui, elle est si pire, t'inquiète.

Myriosis dit :
Tout ça, c'est la faute du Père Noël. Depuis toujours, son code postal est H0H 0H0.

R... dit :
Oh mon doux Jésus, c'est tellement vrai!

Myriosis dit :
Le Père Noël était de son temps. Aujourd'hui, ceux qui font comme lui sont off en criss .

2007/09/20

Hier à l'épicerie, j'ai aperçu le chanteur des Breastfeeders.

Être un enfant quelque part

Machu Picchu est habitée par une population silencieuse d’hirondelles et de lézards. C’est ce qui m’avait frappé, là-bas, les animaux et le silence. Puis, la matinée suivant son cours, une équipe de tournage est même venue enregistrer quelques scènes d’un soap péruvien. Ailleurs, dans les ruines d’un ancien temple, des touristes européens imposaient leurs mains au-dessus de « la stèle ». Railleurs, nous suggérions de revenir au solstice, quand la stèle se transforme en puma – on n’a pas idée de la quantité de roches qui se transforment en animal, les jours de solstice, au Pérou. Puis nous avons pris un petit sentier étroit longeant une falaise. Je me souviens d’y avoir mangé des fraises.

Enfant, je croquais souvent des fraises qui poussaient un peu partout autour de la maison. Il y avait aussi des bleuets, des framboises, toutes sortes de fruits. Je croquais de tout au rythme de mes jeux. Il y avait de grands pins où nous aimions grimper, mes amis et moi. Nous en faisions des maisons ou des fusées, selon notre imagination. Derrière la maison, il y avait un petit bois, tout en pins, où l’on trouvait toutes sortes de choses qui rendaient l’endroit surréaliste : un poulailler avec des lapins, les restes d’un autobus scolaire calciné, des champignons et deux chevaux. Chaque jour, je traversais cet endroit fabuleux pour rejoindre Karim, qui vivait de l’autre côté. Plus loin encore, il y avait des clairières et des champs oubliés, puis des lacs où mon père nous amenait pêcher, puis encore plus loin, quand nous étions au bon endroit pour les apercevoir, il y avait des collines, bleuies par la distance, qui me faisaient rêver tant elles me semblaient inaccessibles.

À Machu Picchu, je me suis demandé ce que se serait, d’avoir de son enfance les images de cette cité inca. Qu’est-ce que c’était, d’être enfant dans les Andes, dans une ville au sommet d’un pic, d’apercevoir un fleuve qui coule, en bas, lorsqu’on se risque à étirer le cou au-dessus, puis lever la tête vers les autres pics des environs ? Qu’est-ce que c’était, de courir en riant dans les rues étroites ? Y avait-il des hirondelles ? Des lézards ? Quels souvenirs gardait-on de son enfance, à Machu Picchu ?

J’y ai repensé, à Solsona, en Catalogne, quand Èric m’a entraîné dans ses propres souvenirs d’enfance. Nous marchions sur un chemin de terre, le long d’un champ en face de chez lui. C’était un champ de blé, tout doré, qui descendait de plus en plus vite à mesure qu’il s’éloignait du chemin, jusqu’à disparaître derrière une crête, cédant le paysage à des collines houleuses, toutes couvertes de blés, qui prenaient de l’ampleur à mesure qu’approchait l’horizon, jusqu’à s’ériger en véritables montagnes : les Pyrénées. Nos pas faisaient crépiter le sol rocailleux sous nos pieds. Dans les quelques pins épars que nous croisions se cachaient des tourterelles dont le chant n’avait pas la tristesse qu’on leur connaît, au Québec. En Catalogne, les tourterelles ne sont pas tristes.

Ma première journée en Catalogne tirait à sa fin. Lentement le soleil tirait sa révérence. Èric m’emmena de l’autre côté du champ, où se dressait une petite église romane sur laquelle se jetait la lumière oblique du soir. La pierre jaunâtre brillait, les champs dorés aussi, le soleil encore plus. On dirait que la Catalogne est faite pour recevoir le soleil.

Nous sommes montés sur le toit de l’église – elle avait quoi, sept cents, huit cents ans ? Là-haut, ça sentait les pins, le blé, la terre cuite et le romarin. La lune montrait son premier quartier. L’heure était à la contemplation. J’ai murmuré : « Qu’est-ce que ce devait être, quand même, d’être enfant ici, d’avoir tout ceci comme terrain de jeu, dans ce décor. » Et Èric d’acquiescer. Et moi de sourire. Je me sentais comme un enfant, dans ce pays que je ne connaissais pas. La réponse à ma question, je l’avais.

2007/09/14

Prédiction à l'emporte-pièce: Yves Boisvert sera le prochain éditorialiste en chef de La Presse.

2007/09/10

Je l'ai déjà dit sur ce blogue, mais je le redis: c'est une bonne idée, quand même d'avoir de la musique en voyage. J'écoute l'Heptade et - magie - je vois les Champs Élysées. Je ne voyais pas ça, avant.

2007/09/05

Els Països Catalans

Ça y est, c'est fait, un mois et demi après mon retour : mes photos de voyages dans mon photorama.

Normalement, les hommes sont meilleurs que les femmes pour indiquer la direction d'un endroit, mais dans le magasin d'alimentation, c'était le contraire. Cela pourrait être dû au fait que les femmes préhistoriques étaient chargées de la cueillette des fruits et légumes.
- "La théorie de l'évolution confirmée... au supermarché", Cyberpresse

Je pense qu'il y a de l'abus dans les rubriques scientifiques de nos quotidiens. On ne peut pas faire des liens aussi tirés par les cheveux sans les expliquer. En fait, je ne sais pas si c'est de l'abus de confiance ou un manque de décence.

Maintenant, quelles conclusions tirer? Que les femmes ont le supermarché dans le sang? Et qu'un supermarché "pour hommes" devrait avoir des provisions mouvantes pour que les clients puissent les traquer?

2007/08/30

Premier regard sur Montserrat


Lorsqu’on aperçoit la silhouette en dents de scie de Montserrat se profiler à l’horizon, on ne doute pas un seul instant que cette montagne ait été sacrée. Depuis la banquette arrière de la voiture, encore sonné par mon récent atterrissage, je regardais la montagne en rêvant aux sorcières qui ont dû se réfugier là-bas, aux fées qu’on a dû apercevoir entre les pics, aux sorciers qui se targuaient de relations privilégiés avec les démons de la montagne … au sang versé – l’Europe est si vieille qu’on peut se demander s’il reste encore des endroits où du sang humain n’a pas coulé. Ah! que de contes de fées ont dû naître autour de Montserrat. Et qui sait s’ils n’en reste pas quelque trace dans nos versions de Cendrillon et de Peau d’Âne ?

Aujourd’hui, sur les flancs de la montagne, un monastère abrite la légendaire Vierge noire – comme quoi le sacré n’est pas mort. Des milliers de touristes et de pèlerins font la queue chaque jour pour voir de près la statuette noircie par la fumée des lampions allumés par les fidèles et autres suppliants.

Nous nous sommes arrêtés au pied de la montagne. Le monastère était perché là-haut. Mon premier monastère perché sur une montagne. J’aurais pu dire : « On se croirait en Europe », mais nous y étions vraiment. Puis, un funiculaire nous a soulevés de terre. Nous montions, dans un heureux silence, vers la montagne, fenêtres grandes ouvertes pour laisser entrer une douce brise. Quand je sortais la terre pour regarder passer la route, loin en bas, j’oubliais presque la cage du funiculaire et c’était comme si je m’envolais vers Montserrat, parmi les papillons et, plus haut, les hirondelles qui vivaient sous les corniches du monastère. Je brandissais ma caméra, pour immortaliser cet envol et le défilé des étranges et fascinantes colonnes de roche qui formaient la montagne.

2007/08/29

Les immigrants qui venaient jadis d’Europe ou d’Amérique latine provenaient de pays dont les us et coutumes avaient beaucoup en commun avec ceux du Québec. Ces bassins de recrutement se sont taris maintenant que ces pays offrent aux leurs des raisons de rester chez eux.

Ce n’est pas diviser les immigrants en bons ou mauvais que de dire que le Québec reçoit aujourd’hui des gens qui viennent de pays ou règnent des croyances religieuses et des valeurs, notamment sur la place de la femme, très éloignées de celles des Québécois.

Des politiques d’intégration qui fonctionnaient jadis pour certaines communautés ne fonctionnent plus du tout aujourd’hui pour d’autres. On ne trouvera pas de solutions si on fait semblant que le problème n’existe pas.

Plusieurs communautés musulmanes sont aussi infiltrées par des activistes fondamentalistes animés par la haine de l’Occident. Intimidée, la majorité modérée ne les débusque pas. Où cela conduira-t-il ?

Mettez-vous enfin à la place de l’immigrant qui arrive à l’aéroport Trudeau. Le Québec lui dit: la langue officielle ici, c’est le français. Le Canada lui répond: non, ici, c’est un pays bilingue.

La philosophie québécoise lui demande d’adopter nos valeurs. La philosophie canadienne l’encourage à conserver sa culture d’origine. Mélangeant, vous dites?
- Joseph Facal


2007/08/23

Catalan élémentaire

Voilà, c'est fait. Hier je me suis inscrit en tant qu'étudiant libre au cours de catalan élémentaire à l'Université de Montréal. J'invite tout le monde à en faire autant.
Et pour ceux que ça intéresse, il y a aussi un cours de culture et civilisation catalanes.
Dépêchez-vous, les places sont limitées!

(Et on peut faire la même chose à l'Université Laval!)

2007/08/19

Émile Zola, L'assommoir, Bookking International, coll. "Classiques français", Paris, 1993, 410 p.

2007/08/17

Premier regard sur l'Europe (bis)

J'ai toujours l'impression de débarquer en catastrophe des avions, comme si j'ai été catapulté de chez moi, à califourchon sur une roche, pour me retrouver là, patatra dans un nouveau monde, sans trop comprendre. C'est à cause de mon hébétude. Je me rends compte que je suis là, complètement hagard, épuisé par le trajet mais excité par ce qui m'arrive. Je sors de l'aéroport et c'est comme un raz-de-marée qui me ramasse - à cause des sens. Naître ne doit pas être bien différent. On découvre qu'il y a de l'air, une odeur, une température, et surtout une lumière. La lumière est différente à Barcelone. Ici, on dirait qu'elle coule sur les choses, comme de l'eau. Là-bas, elle irradie. Tout brille, alors qu'ici tout est éclairé. C'est quelque chose, quand même, de basculer dans un monde qui brille, rapport que ça éblouit. Puis on avance à tâtons dans toute cette lumière, un peu comme un aveugle, ou un sacré myope. Même une semaine après mon arrivée, je cherchais encore les interrupteurs le long des murs, les serrures dans les portes. Je ne voyais rien de ces choses-là.

Dès notre arrivée en Catalogne, mon Catalan m'a demandé : qu'est-ce que tu vois ? J'étais content qu'il me pose la question, sinon j'aurais pu oublier la réponse dans l'enchevêtrement de mes émotions mêlées. Grâce à lui, nous n'oublierons pas.

J'ai regardé par le hublot de la voiture. Nous roulions sur l'autoroute, entre des collines ocreuses sur lesquelles s'accrochaient des arbustes de peine et de misère. Ça sentait la Méditerranée jusque dans le creux des rochers. J'ai sûrement vu passer des oliviers, à ce moment-là, mais je ne savais pas les reconnaître. J'étais absolument fasciné par l'état des collines, si friables qu'on aurait dit qu'un sourire les ferait craquer. D'ailleurs elles craquaient de partout. Je devais sourire beaucoup.

"L'érosion", que j'ai répondu. "On dirait que tout s'effrite." Silence dans l'auto. Je me demande si mon Catalan s'attendait à cette réponse. Puis, entre deux rayons de soleil, j'ai regardé les villages qui bordaient la route. Ils étaient tous en pierre, de la même pierre que les collines. Les maisons s'effritaient donc elles aussi et un j'ai senti un gouffre immense s'ouvrir - un gouffre métaphysique, s'entend. Ça donne le vertige, quand même, de voir l'âge d'une maison dans l'usure de sa pierre plutôt que dans la pourriture du bois, dans la rouille ou dans la peinture qui décole. "Le passé", que j'ai fini par ajouter. "Il est presque indécent."

Il y avait, en effet, beaucoup trop de pierres nues pour mes yeux vierges d'Europe. On aura beau dire qu'à Montréal les gratte-ciels côtoient des vieilles églises et que c'est tout un contraste, les vieilles églises européennes côtoieront toujours d'autres églises encore plus vieilles, vieilles comme des montagnes - et entre elles se faufileront des voitures, comme celle où j'étais. Tout était si vieux que je me disais que ça n'avait pas de bon sens. C'était presque trop. Oui, j'aurais voulu porter plainte pour attentat à la pudeur, car j'étais historiquement pudique. J'aurais voulu des pancartes : monument historique. Mais il aurait fallu en mettre partout, au point où les choses en auraient été cachées. Aucune pancarte, donc : que mon propre jugement devant des vieilles roches.

Évidemment, j'avais le goût de pleurer tant j'étais ému. Un peu comme un bébé qui regarde tout pour toute la première fois.

2007/08/08

Le laveur de vitre

Par ma fenêtre, j'aperçois un laveur de vitre qui, avec son longue perche, nettoie ma fenêtre et celles de mes collègues. Je ne peux pas m'empêcher de le regarder. Je ne travaille plus.

2007/08/07

Heureux qui comme Ulysse

La musique souvent me prend comme une mer!
Vers ma pâle étoile,
Sous un plafond de brume ou dans un vaste éther,
Je mets à la voile;

- Charles Baudelaire

La Catalogne était revenue de son pays, ses bagages jonchaient encore, épars, le sol de notre chambre. Nous étions tous deux allongés, c'était de belles retrouvailles. Puis elle s'est levée, je l'ai entendue marcher jusqu'au salon, mettre un disque dans le système de son. Je devinais ce qu'elle faisait. J'ai fermé les yeux et, pendant que le système chargeait la musique dans les circuits, la Catalogne est venue me rejoindre.

On ne peut pas dire que notre voyage ait été très riche, musicalement parlant. Nous n'avions, pour nous divertir l'oreille, que quelques disques, pas les meilleurs, à faire jouer dans l'auto. Cependant, au fil des kilomètres, certaines chansons se sont distinguées des autres, des chansons que je n'ai entendues que dans l'enceinte de notre véhicule. Et voilà que la Catalogne ramenait ces musiques d'Europe, les portant à mon oreille pour que, bien installé dans le lit, je puisse revoir en songe les routes que nous avons parcourues avec elles. Les images fusaient. C'était comme une éruption dans ma mémoire et mes paupières servaient d'écran sur lequel se projetait mes souvenirs. Je revoyais la route, la lumière si blanche du soleil catalan, les châteaux sur les collines, les ruines d'églises gothiques oubliées dans un champ, les vignobles, les oliviers plantés en rangs, la mer... C'était comme un geyser que je devais contenir. Et bien sûr je ne retenais pas tout. La mémoire est si fluide, elle glissait de mes yeux fermés pour ruisseler sur mes joues. C'est fou comme ça coulait, un vrai torrent, au point où la Catalogne s'est inquiétée. J'ai dû jurer qu'il n'y avait là que matière à souvenirs, que ces larmes ne cachaient aucun monstre abyssal.

Puis la musique s'est arrêtée, j'ai pu reprendre mes esprits, ouvrir les yeux et me retrouver échoué dans mon lit.

2007/08/02

Il n'y a pas si longtemps encore on entendait dire: "Y'a juste ici que ça arrive." Maintenant, ça arrive aussi au Minnesota, USA. Notre québécitude peut aller se rhabiller.